
Vous rêvez d’évasion et de dépaysement ? Vous avez de l’imagination à revendre ? Vous voulez vous essayer à l’écriture ?
Voilà maintenant deux semaines qu'un cadavre exquis collectif a été lancé sur le thème de l'enfance. Les écrivains tunisiens Khaoula Hosni et Mohamed Harmel ont rédigé le premier paragraphe d’une histoire que certains d'entre vous se sont amusés à écrire, ensemble.
Sans plus attendre, découvrez le texte final et plongez dans l'histoire farfelue du Monde de Khalil.
Le monde de Khalil !
Khalil n’était pas un petit garçon comme les autres. Il n’avait pas assez les pieds sur terre et un peu trop la tête dans les nuages, au goût de ses camarades. Si "les pieds sur terre" voulait dire le goût pour les matchs de foot, ainsi que pour les bagarres et les farces dans la cour de l’école, "la tête dans les nuages" voulait dire rêver, rêvasser un peu trop, parler tout le temps des mondes imaginaires tels que ceux de Harry Potter, de Bilbon le Hobbit et du Seigneur des Anneaux. Khalil était pourtant heureux dans cet univers. Le réel, du moins tel qu’il se présentait, ne l’intéressait pas. Il était heureux dans les mondes que les livres déployaient et qu’il complétait et redessinait à sa guise.
Étendu sur son lit, absorbé par la lecture de l’une de ses sagas préférées, Il s’interrompit un moment pour écouter le boucan qui provenait du salon. La voix grave du présentateur qui annonçait les infos catastrophiques sur la propagation de ce Coronavirus traversait les portes et les couloirs, et s’introduisait jusque dans sa chambre. Coronavirus, pandémie, fin du monde ? Vraiment ? Son papa en parlait à longueur de journée, et développait de longues analyses durant les dîners. Peut-être étaient-ils en train de basculer vers un autre monde, après tout…
Khalil soupira. Déposant son livre ouvert sur sa poitrine, il ferma les yeux, repensant aux dernières lignes qu’il venait de lire, et les visualisant avec une étonnante précision. Son imagination débordante le transporta à nouveau vers ces fameux nuages, là où cette sombre réalité ne pouvait plus l’atteindre. Vers un monde magique et imaginaire qui n’appartenait qu’à lui. Il n’entendait plus que les battements de son cœur, la voix du présentateur devenant de plus en plus vague et lointaine, au fil des secondes…
Boum !
...
Un citron entra dans la pièce où il se trouvait et lui dit : "vous les jeunes il vous faut toujours de l’extraordinaire et vous le cherchez partout sauf dans votre quotidien ! Ha ha ! Si vous regardiez autour de vous vous verriez l’extraordinaire dans un citron par exemple". Et le citron se mit à prendre une taille de plus en plus grande :
- Je vais t’apprendre quelque chose petit ignorant !
- Mais pourquoi me parles-tu ainsi ?
- Qui te dit que je suis ignorant ? Et de qui parles-tu quand tu dis “les jeunes” ? Et qui te dit que je suis jeune ?
Le citron était complètement déstabilisé mais il n’en montra rien et répliqua :
- Monte, je t'emmène sur l’île aux citrons, à l’ombre d’un volcan. Sicile est appelée. Un terre arabe et multiethnique où les rêves deviennent parfois réalité.
Khalil hésita, lui qui voyageait toujours d’esprit tout en étant chez soi, avait peur de suivre le citron vers cette île. Mais la tentation était grande, et si vraiment ses rêves pouvaient se réaliser ?
Khalil et le citron montèrent à bord d’un petit radeau de bois, direction l’île aux citrons. Khalil ressentait de l’appréhension, beaucoup d’appréhension… un enfant au milieu de citrons, drôle d’image.
Le citron, quant à lui, avait hâte de faire découvrir à cet enfant à l’imagination débordante toute ce que cette île refermait de trésors. Il voulait repeindre avec lui le monde et lui prouver que l’acidité n’est pas forcément une mauvaise chose. Après tout, c’est de l’acidité du citron que coulent les plus somptueuses limonades.